1Post-vérité, théories du complot, fakes :
l’usage récurrent de ces termes dans la sphère publique dit bien les
inquiétudes fortes à l’égard des questions d’exactitude et de
crédibilité de l’information. Le poids politique des informations
fausses ou volontairement biaisées a ainsi été souligné à l’occasion des
dernières élections présidentielles américaines et françaises. Facebook
et Google, jugées responsables de leur propagation, tentent de mettre
en œuvre des systèmes de contrôle de ce type d’informations, ce qui,
d’une certaine manière, témoigne d’un manque de confiance envers les
capacités des citoyens à faire face par eux-mêmes à ce problème. Dans ce
contexte caractérisé par l’incertitude sur la valeur de vérité de
l’information numérique, l’enseignement de son évaluation critique
paraît être une composante essentielle de l’éducation aux médias et à
l’information (EMI). En France, son importance a été rappelée à
plusieurs reprises dans les discours et les orientations éducatives
institutionnels récents. Cet enseignement est ainsi articulé à des
enjeux sociétaux, démocratiques et cognitifs (Serres, 2012).
2Selon
nous, la réflexion sur ce sujet mérite d’être resituée dans la
tradition de l’éducation aux médias, qui s’est forgée en affirmant
certains principes pédagogiques. L’un d’entre eux consiste à prendre en
compte « les connaissances et l’expérience que les jeunes ont des
médias » (Frau-Meigs, 2006, p. 28) afin de mieux les faire
évoluer. Ce principe est habituellement formulé pour le vaste ensemble
des connaissances et des compétences composant le champ de l’EMI. Il ne
semble pas avoir fait l’objet d’une analyse approfondie qui concerne
spécifiquement l’apprentissage de l’évaluation critique de
l’information. L’objectif de cet article est donc d’examiner, à partir
d’une synthèse des recherches existantes, la possible articulation
entre, d’une part, les pratiques évaluatives de l’information en ligne
habituellement mises en œuvre par les jeunes et, d’autre part,
l’enseignement de son évaluation critique. Dans quelle mesure est-il
possible de prendre en compte cette dimension de l’expérience
informationnelle juvénile dans le cadre de l’EMI ?
3Il
ne s’agit pas, ici, de recenser la totalité des objectifs
d’apprentissage à viser ni de décrire l’ensemble des activités
pédagogiques dans ce domaine, mais plutôt d’ouvrir des perspectives sur
cet enseignement en relation avec les acquis de la recherche en
psychologie sociale et cognitive ainsi qu’en sciences de l’information
et de la communication. Nous exposerons tout d’abord des études portant
sur la manière dont les jeunes évaluent l’information sur le web, puis
opérerons une distinction entre les heuristiques – le recours à des
raccourcis mentaux qui permettent de formuler des jugements rapides sur
l’information et ses sources – et l’emploi de stratégies
analytiques. Nous examinerons ensuite si ces modes opératoires sont
intégrés dans les travaux scientifiques sur l’enseignement de
l’évaluation de l’information. Nous discuterons enfin de l’intérêt de
leur possible prise en compte dans ce cadre.
4Préalablement,
nous devons définir ce que nous entendons par évaluation de
l’information. Celle-ci correspond à une opération mentale aboutissant à
un jugement sur la valeur d’une information. Ce jugement est formulé à
partir d’indices prélevés sur la source et/ou sur son contenu sémantique
qui sont rapportés à des critères. Les travaux sur le sujet ont
identifié un grand nombre de critères – le plus souvent autour
d’une trentaine – qui justifient le tri opéré lors de recherches
d’information (cf. les synthèses de Boubée et Tricot [2010] et de Serres
[2012]). Nous proposons de distinguer deux grandes catégories de
critères mobilisés à l’occasion de cette opération.
5La
première catégorie rassemble les jugements que nous qualifierons de
pragmatiques. Ils reposent sur des critères se rapportant à l’utilité du
document et de son contenu ainsi qu’à leur facilité d’accès et
d’utilisation.
6La
seconde catégorie regroupe les jugements d’ordre épistémique. Nous
entendons par là les critères relatifs à la valeur de vérité de
l’information proposée par des sources. C’est la prise en compte de ce
type de critères qui est considérée comme étant essentielle pour une
analyse critique de l’information. La formation du jugement épistémique
et de l’évaluation de la fiabilité des sources est un point de jonction
entre l’éducation aux médias orientée sur « l’information
actualité » (Piette, 1996) et l’éducation à « l’information
connaissance » mise en œuvre dans le monde des bibliothèques et des
centres de documentation et d’information situés dans les
établissements scolaires et universitaires (Serres, 2012). Cette
conjonction se retrouve également sur le plan scientifique. Les études
présentées ici sont issues tant des sciences de l’information (library information science) que des sciences de la communication (media studies). Elles sont complétées par d’autres provenant de la psychologie cognitive et sociale ainsi que des sciences de l’éducation.
7Les
évolutions éditoriales et sémiotiques des médias numériques ont engendré
une large gamme de travaux scientifiques sur l’évaluation de la
crédibilité de l’information par les publics. Les jeunes constituent une
population particulièrement étudiée. Comme le notent Flanagin et
Metzger (2008), la fréquence de leurs usages numériques contraste avec
leur développement cognitif et leur expérience de vie limitée. Dès lors,
ils peuvent paraître particulièrement vulnérables dans un environnement
numérique caractérisé par l’hétérogénéité de la qualité des
informations disponibles.
8Lors
de leurs recherches d’information, les jeunes tendent à minorer, voire à
occulter les critères concernant la crédibilité de l’information et
l’autorité de la source. Macedo-Rouet et ses coauteurs (2013) ont
confronté des élèves de 9-10 ans à des textes argumentatifs courts sur
une question controversée. La majorité d’entre eux réussissent à
identifier correctement les différentes sources, mais omettent de
prendre en compte leurs caractéristiques propres pour déterminer la plus
compétente sur le sujet. L’étude de Watson (2014) auprès de lycéens
âgés de 14 à 17 ans offre une vision complémentaire. Leurs
jugements épistémiques sur les sites web se sont fondés sur différents
critères, comme leur réputation, leur adresse URL, leur conception
graphique, le style d’écriture utilisé et l’autorité de leurs
responsables.
9Les
études conduites dans l’enseignement supérieur renvoient des visions
différentes des pratiques et des compétences des étudiants dans ce
domaine. Certains travaux mettent plutôt l’accent sur leurs lacunes. La
recherche de Britt et Aglinskas (2002) a ainsi concerné des lycéens et
les étudiants de licence soumis à une tâche de lecture et de prise de
notes à partir de documents de différentes natures. Il s’avère que la
grande majorité d’entre eux ne prête pas spontanément attention à la
source des informations et n’éprouve pas la nécessité de corroborer les
informations utilisées pour rédiger leurs synthèses. Ces résultats ont
été confirmés par Taylor (2012). Il semble donc que soit les étudiants
ont confiance dans la validité de l’information trouvée, soit ce critère
n’est pas au centre de leurs préoccupations. D’autres recherches
dépeignent pourtant des étudiants ayant des comportements plus réfléchis
et beaucoup plus attentifs aux questions de fiabilité. Par exemple,
l’enquête par questionnaire réalisée par Liu (2004) renvoie l’image de
jeunes plutôt prudents et même dotés de compétences en matière
d’évaluation informationnelle sans être pour autant experts dans ce
domaine. Ces étudiants de licence et de master ont ainsi déclaré se
référer à des critères relatifs à l’autorité de la source (origine
institutionnelle du site, affiliation de l’auteur) et à sa réputation.
10Il
est néanmoins nécessaire de distinguer ce que les jeunes disent faire et
ce qu’ils font réellement. En effet, ils peuvent avoir conscience des
problèmes liés à la possible inexactitude de l’information sur le web et
connaître les critères d’évaluation sans pour autant les appliquer.
C’est le cas des étudiants de licence dont les pratiques ont été
analysées par Kim et Sin (2011). Ces étudiants ont ainsi stipulé que
l’exactitude de l’information et la fiabilité de la source étaient les
critères d’évaluation les plus importants. Toutefois, ceux-ci ont été
purement et simplement oubliés lors de recherches d’information. Un même
constat est dressé pour des élèves du secondaire (moyenne d’âge
14 ans) observés par Walraven, Brand-Gruwel et Boshuizen (2009)
qui, bien que conscients de la possible existence d’informations
erronées, se sont peu préoccupés de l’autorité de la source lors de la
résolution d’un problème informationnel.
11Par
ailleurs, les travaux scientifiques soulignent l’importance de critères
formels qui semblent primer sur l’analyse critique du contenu et de la
source. L’apparence des sites web et la présence d’images sont ainsi
prises comme des indices de confiance. Les analyses de l’activité
informationnelle des collégiens et des lycéens ont en effet montré que
les images sont exploitées afin d’identifier rapidement la nature des
informations proposées par un site web (Fidel et al., 1999) et
d’écarter celles qui paraissent non pertinentes (Boubée, 2007). Elles
servent de point d’appui pour décider de l’intérêt d’un site et se
dispenser d’examiner la crédibilité de l’information et l’autorité des
sources. Pour 37 % des collégiens et 25 % des lycéens
interrogés par Sahut (2015), la présence de photos est considérée comme
un indice de crédibilité d’un article de Wikipédia. Une étude récente
menée auprès de lycéens montre que la majorité d’entre eux se fonde sur
une photo en ligne pour juger de l’exactitude d’une affirmation
l’accompagnant, sans tenir compte de sa source (Stanford History
Education Group, 2016).
12Ces
différents travaux confirment les difficultés des jeunes en matière
d’évaluation de la crédibilité de l’information. Ceux-ci paraissent
désarmés face à ce que Latour (2011) dénomme le dérèglement des
« thermostats de l’autorité ». Il existe ainsi un décalage
entre les attentes académiques et la manière dont les jeunes procèdent.
Pour aller au-delà de ce constat, nous devons prendre en compte les
processus cognitifs à l’œuvre lors de l’évaluation épistémique de
l’information. Dans cette optique, les travaux menés autour de la
cognition sociale amènent à distinguer deux processus distincts de
traitement de l’information : les heuristiques vs le mode systématique.
13L’Heuristic-Systematic Model of information processing (HSM) élaboré par Chaiken (1980) et l’Elaboration Likelihood Model
(ELM) de Petty et Cacioppo (1986) constituent deux modèles forgés pour
l’étude des jugements et des changements d’attitudes des personnes
exposées à des messages persuasifs. Ils mettent en exergue la dualité
des processus de traitement de l’information.
14Le
premier processus, nommé « traitement systématique » ou
« voie centrale », repose sur un examen attentif du message
(analyse de son contenu explicite et implicite, identification des
intentions de la source). Il est mis en œuvre quand les sujets
considèrent que le message revêt une importance particulière et qu’ils
ont une réelle capacité et motivation pour traiter les informations. Ce
processus mobilise de nombreuses ressources cognitives nécessaires à
l’analyse détaillée des informations disponibles.
15À
l’inverse, le « traitement heuristique », ou « voie
périphérique », est rapide, superficiel, souple. Le récepteur a
recours à des heuristiques – c.-à-d. des règles préconstruites
disponibles dans sa mémoire, par exemple « les opinions partagées
sont les plus justes » –qui constituent autant de
moyens simplifiés de traiter l’information. Les sujets se contentent
d’indices périphériques (par exemple la longueur du message ou les
éléments traduisant le niveau d’expertise de la source) pour en inférer
la validité du message. Les heuristiques sont ainsi des règles
décisionnelles qui obéissent à un principe d’économie cognitive. Ces
scripts ou raccourcis mentaux sont acquis à l’occasion des pratiques
sociales et par l’enseignement (Ghiglione, 1992).
16Dans
le contexte de l’évaluation d’informations en ligne, la mise en œuvre
d’heuristiques consiste en un examen rapide et superficiel des
documents. Un seul type d’indice est pris en compte pour inférer la
crédibilité de l’information. Dans d’autres situations, les sujets ne se
contentent pas du recours à une heuristique, mais emploient une
stratégie analytique (St Jean et al., 2011). Ils
effectuent alors un traitement sémantique plus profond du message,
recherchent une pluralité d’indices de crédibilité au travers de
l’identification de la nature de la source, des qualifications et des
intentions de l’auteur, vérifient les informations en ayant recours à la
source primaire ou les corroborent en consultant une pluralité de
sources. Les traitements analytiques sont habituellement considérés
comme étant plus appropriés pour juger de la crédibilité des
informations et de la confiance accordée à une source.
- 1 Ce constat n’exclut pas leur fréquente utilisation chez les adultes. Le fait est que les études dan (...)
17Lorsque
les jeunes recherchent et lisent des informations sur le web, plusieurs
études montrent qu’ils ont plus fréquemment recours à des heuristiques
qu’à des stratégies analytiques1 (Hilligoss et Rieh, 2008 ; Metzger, Flanagin et Medders, 2010 ; St Jean et al.,
2011 ; Sundar, 2008 ; Watson, 2014). Nous proposons de
retenir cinq heuristiques qui sont mentionnées de manière récurrente
dans ces travaux et qui pourraient être, comme nous le verrons par la
suite, exploitées dans le cadre de l’EMI.
18L’heuristique visuelle est
fondée sur l’apparence des pages consultées, leur design visuel. Quand
leurs qualités esthétiques sont perçues, elles bénéficient d’un jugement
de crédibilité positif. À l’inverse, une présentation jugée
négativement engendre une impression d’amateurisme qui n’inspire pas
confiance et aboutit au rejet du document.
19L’heuristique expérientielle est
issue de la familiarité avec la source consultée. L’expérience positive
de la source a, par le passé, permis d’éprouver son expertise et son
honnêteté, ce qui dispense d’un examen approfondi de la crédibilité de
l’information proposée.
20L’heuristique de réputation renvoie
à l’opinion d’autrui qui est intériorisée et fait figure de repères
lors de la formation de jugements épistémiques. Selon cette logique, une
source est jugée fiable, car elle a été recommandée par d’autres
personnes, notamment par celles qui sont estimées compétentes et dignes
de confiance. Par exemple, si un enseignant recommande un site à ses
élèves, ceux-ci pourront estimer qu’il est inutile de se pencher sur les
qualifications de l’auteur ou encore de corroborer l’information. Cette
réputation peut être qualifiée d’informelle, au sens où elle renvoie à
des phénomènes sociocognitifs qui circulent entre personnes (Origgi,
2015). Sur les réseaux sociaux numériques, les internautes disposent
également d’indices qui construisent une réputation objectivée. Les
dispositifs numériques offrent en effet la possibilité d’agréger les
appréciations des internautes et de les traduire en un indice chiffré
qui paraît refléter l’opinion générale.
21L’heuristique d’auto-confirmation représente
une tendance des individus à considérer comme crédibles les
informations qui confirment leurs croyances préexistantes. Inversement,
les thèses et les idées qui vont à l’encontre de convictions préétablies
seront tenues pour moins crédibles même si elles sont argumentées de
manière appropriée.
22Enfin, l’heuristique d’expertise se
fonde sur la reconnaissance de signes symbolisant l’autorité de
l’auteur et de la source éditoriale (titres et fonctions de l’auteur,
nature de la source…). Leur rattachement à une institution académique
favorise l’instauration d’une relation de confiance avec le lecteur et
atteste de la crédibilité de l’information. L’attention portée aux
adresses URL, fréquemment relevée dans les études empiriques, peut être
interprétée comme la recherche d’un indice attestant du caractère
officiel du site et, donc, de sa fiabilité.
23Comment expliquer ce recours si fréquent à des heuristiques plutôt qu’à des stratégies évaluatives plus complètes ?
24Il
existe une forte convergence des travaux sur les pratiques
informationnelles juvéniles. Les jeunes tendent à limiter les efforts
cognitifs ainsi que le temps consacré à la recherche d’information
(Biddix et al., 2011 ; Connaway, Dickey et Radford, 2011). La notion de convenience
(commodité), souvent employée, fait référence à la propension à se
diriger vers des sources dont l’accès et l’exploitation sont aisés,
offrant parallèlement une information utile jugée « suffisamment
bonne » en fonction du temps dévolu à la recherche. En d’autres
termes, les jugements d’ordre pragmatique semblent souvent prédominants
par rapport aux considérations épistémiques.
25En
se référant à la théorie de la rationalité limitée (Simon, 1955), on
peut estimer que les individus cherchent un équilibre optimal entre
l’effort cognitif et les résultats informationnels souhaités. Leurs
limitations cognitives et les conditions matérielles et temporelles dans
lesquelles se déroule la recherche font qu’ils ne choisissent pas les
meilleures sources, mais celles qui leur paraissent acceptables dans le
contexte qui est le leur. Le recours fréquent aux heuristiques évoquées
plus haut obéit à un souci d’économie cognitive et temporelle. Cela ne
reflète pas une absence de préoccupation à propos de l’autorité des
sources et de la crédibilité de l’information, mais plutôt une
modulation de l’importance accordée à ces critères en fonction des
enjeux perçus de la recherche et des conditions concrètes dans
lesquelles elle se déroule. Bien évidemment, le contexte actuel
d’abondance informationnelle a une forte incidence sur ces pratiques.
Ces différentes heuristiques permettent de trier rapidement la grande
quantité d’informations offertes par les moteurs de recherche et les
réseaux socionumériques. En s’appuyant sur les analyses de Todd et
Gigerenzer (2000) et de Tricot (2016), il est possible de soutenir
qu’elles découlent d’une forme d’adaptation – consciente ou
non – de la cognition humaine aux problèmes informationnels
actuels. Selon cette perspective, les heuristiques constituent une forme
spécifique de connaissances procédurales acquises lors de pratiques
numériques réitérées. Nous pouvons d’ailleurs remarquer que leur emploi
n’est pas spécifique aux jeunes. En ce sens, les études menées sur un
public adulte indiquent aussi le rôle essentiel de l’apparence visuelle
des sites sur la formation des jugements épistémiques (Fogg et al., 2003).
26Les
difficultés rencontrées par les jeunes dans le domaine de l’évaluation
épistémique de l’information conduisent à une réflexion d’ordre
pédagogique sur la nature des connaissances et/ou des compétences à
développer. Nous avons ici distingué deux formats de connaissances
pouvant faire l’objet d’un enseignement dans le cadre de l’EMI :
les connaissances conceptuelles infomédiatiques et les compétences
d’évaluation de l’information. Nous ne cherchons pas à lister de manière
exhaustive les objectifs à viser dans ce domaine, mais à distinguer ces
apprentissages tout en identifiant à la fois les limites de ces
approches didactiques et les questions non résolues par la recherche.
27Selon
Serres (2012), l’enseignement de l’évaluation de l’information doit
viser avant tout l’acquisition de notions comme la crédibilité, la
qualité, la validité, la pertinence, la véracité, la fiabilité… Leur
compréhension est considérée comme une condition nécessaire pour
effectuer un filtrage efficace de l’information. Elles formeraient
l’arrière-plan conceptuel qui soutiendrait la mise en œuvre d’un
ensemble de critères d’évaluation lors de l’analyse critique des
sources. Cette réflexion peut être intégrée dans une orientation plus
globale de l’éducation aux médias présente depuis de nombreuses années.
L’acquisition de connaissances d’ordre conceptuel sur les modes
d’élaboration de l’information est censée favoriser la formation de
jugements distanciés et raisonnés à son égard (Landry et Basque,
2015 ; Masterman, 1997). Mieux comprendre comment fonctionne un
système médiatique ou informationnel et connaître les processus de
sélection, de traitement et de représentation de l’information en jeu
afin de « déconstruire » les messages véhiculés constituent
autant d’objectifs destinés à développer les compétences critiques.
28On
ne niera pas que les conceptualisations de l’autorité académique
– c.-à-d. le pouvoir d’influence symbolique des sources rattachées à
des institutions de savoir comme la recherche, l’école, la
bibliothèque… – et des modalités de construction de l’information
jouent un rôle important pour son appréhension critique. Néanmoins,
l’acquisition de ce type de connaissances suffit-elle pour évaluer de
manière critique l’information rencontrée sur le Web lors de situations
effectives ? La question se pose, car, comme l’ont établi plusieurs
recherches empiriques mentionnées plus haut, les jeunes peuvent avoir
intégré les critères d’évaluation relatifs à l’autorité d’une source,
mais ne pas les mobiliser lorsqu’ils sont en situation de recherche
d’information. Ceci peut être dû à la prédominance des jugements
pragmatiques sur des considérations épistémiques et/ou à la difficulté
d’opérationnaliser des concepts pourtant connus. On sait en effet que
cette opération dite de « procéduralisation » (transformation
de connaissances abstraites en une méthode qui puisse être appliquée
dans des conditions variées) est complexe, coûteuse et nécessite une
pratique réitérée (Pradère, Musial et Tricot, 2012). D’un point de vue
scientifique, il serait donc intéressant d’évaluer les effets de
l’enseignement de telles notions et ainsi d’identifier les difficultés
et les réussites de cette approche pédagogique.
29Sur
le terrain, de nombreuses activités pédagogiques visant le
développement de compétences d’évaluation critique de l’information en
ligne sont mises en place. Seul un nombre très restreint d’entre elles a
fait l’objet d’un suivi et d’une analyse scientifique. Celles que nous
avons repérées dans la littérature sur le sujet s’inspirent directement
du « modèle documentaire » centré sur la lecture en
environnement complexe (Rouet, 2000). Celui-ci rend compte des
compétences d’experts confrontés à la lecture d’une multiplicité de
documents portant sur des thématiques pour lesquelles il n’existe pas de
consensus évident. Ce type de lecteur identifie et mémorise des
informations sur leur contenu de même que sur leur source. Il construit
de cette manière une représentation des thèses et des arguments évoqués
par chacun des textes qu’il associe avec des éléments ayant trait à leur
source (auteur, contexte de production, genre) et à ses buts
rhétoriques (intentions et destinataires du document). Quand les
documents portent sur un sujet controversé, il articule les différentes
sources par des relations rhétoriques (convergence, opposition,
temporalité, citation...). L’identification des caractéristiques de la
source constitue donc un élément essentiel pour le lecteur qui lui
permet de différencier les informations et d’évaluer l’apport de chaque
document au débat. Ainsi, même si ce modèle n’est pas centré uniquement
sur l’appréciation de la valeur épistémique de l’information, il met en
évidence l’existence de compétences inhérentes à son évaluation, qui
sont autant d’objectifs à viser dans le cadre de l’EMI.
30En
se référant à ce modèle, Wiley et ses coauteurs (2009) ont mis en place
une séquence pédagogique auprès d’étudiants de licence. Celle-ci a
consisté en une explication des critères d’évaluation (expertise et
intention de l’auteur, scientificité de l’information, qualité de
l’argumentation) suivie d’une application de ces critères à différents
textes en ligne. À la suite de cet enseignement, les étudiants ont
effectué une tâche d’analyse de sites web et ont montré des progrès dans
la discrimination des sources selon leur fiabilité. Braasch et ses
collègues (2013) ont proposé à des lycéens d’examiner deux stratégies
contrastées d’évaluation des sources, l’une reflétant une démarche d’un
expert, l’autre, d’un non-expert. Par la suite, ils ont dû réaliser un
travail écrit reposant sur l’analyse et l’exploitation de documents.
Comparativement aux élèves qui n’ont pas suivi cet enseignement, ces
lycéens ont été davantage en mesure de justifier ce classement en
faisant appel à des caractéristiques inhérentes à la fiabilité des
sources.
31Ces
exemples montrent qu’un enseignement de l’évaluation de l’information
est susceptible de favoriser l’acquisition de compétences
informationnelles, du moins pour des tâches académiques. En effet, il
faut avoir à l’esprit que ces résultats proviennent d’expérimentations,
ce qui implique que les tâches de lecture et d’évaluation ont été
aménagées pour les besoins de l’expérience. Les élèves ou les étudiants
ont été placés en situation de répondre à des questions dans un contexte
scolaire à partir d’un nombre limité de documents. Il est donc possible
de s’interroger sur l’applicabilité de ces résultats à des situations
de recherches authentiques – c.-à-d. socialement situées – sur
le web (Macedo-Rouet et al., 2013).
32Au-delà
des différences entre ces deux approches pédagogiques, nous relevons un
point commun : elles visent l’acquisition de stratégies
analytiques et n’intègrent pas de manière explicite les heuristiques
évaluatives qui sont majoritairement utilisées par les jeunes. Ce
constat peut surprendre. De manière générale, la prise en compte des
connaissances préexistantes – au sens large de représentations, de
concepts, de savoir-faire, de méthodes, d’automatismes… – dans des
situations pédagogiques est reconnue comme une condition favorisant
l’apprentissage de nouvelles connaissances, que ce soit dans les cadres
théoriques constructivistes (Piaget), socioconstructivistes (Vigotsky)
ou cognitivistes (Ausubel). Elle est donnée comme étant particulièrement
importante dans le cadre de l’éducation aux médias et à l’information
(Cordier, 2012 ; Delamotte, Frau-Meigs et Liquète, 2014). Le
décalage entre ce principe et les pratiques pédagogiques évoquées nous
amène à réfléchir à la possible intégration des heuristiques dans
l’enseignement de l’évaluation critique de l’information.
33La
question du transfert des apprentissages informationnels, entendu au
sens de « capacité qu’a un apprenant à résoudre de nouvelles
situations en mobilisant des connaissances apprises antérieurement dans
des situations différentes » (Frenay, Bédard, 2006, p. 126),
est cruciale dans le cadre de l’EMI, du fait des enjeux sociaux et
démocratiques qui lui sont attachés. On note pourtant que le transfert
des compétences informationnelles entre les sphères scolaire et
extrascolaire reste limité. Les représentations des jeunes usagers sur
les sources, leurs manières de faire, les schèmes mis en œuvre
paraissent étroitement dépendants du contexte dans lequel se déroule
l’activité de recherche et d’évaluation de l’information (Bruillard et
Fluckiger, 2010). Les élèves de 6e observés par Cordier
(2011) semblent se plier aux injonctions ou conseils des
professeurs-documentalistes quand ils font des recherches au CDI, mais
avouent ne pas en tenir compte lors d’usages à domicile. Le cas de
Wikipédia est à ce sujet symptomatique. Les étudiants de licence et de
master accordent nettement moins de confiance à l’encyclopédie
collaborative pour des tâches académiques que pour des recherches
d’information liées aux loisirs (Sahut, 2014). Cela tient
essentiellement à la mauvaise réputation de l’encyclopédie chez la
majorité de leurs enseignants.
34Ce
cloisonnement des pratiques informationnelles scolaires et
extrascolaires pose problème, car elle constitue un obstacle au
transfert des apprentissages effectués dans le cadre de l’EMI, notamment
en matière d’évaluation de l’information. De surcroît, les méthodes
d’analyse critique des sources proposées par les enseignants sont
susceptibles de ne pas être appliquées par les élèves ou les étudiants,
car elles sont trop éloignées de leurs pratiques habituelles et trop
coûteuses à mettre en œuvre lors des recherches d’information
authentiques. En ce sens, Meola (2004) a souligné le caractère inopérant
de l’enseignement d’une liste de critères d’évaluation (autorité,
exactitude, objectivité, actualité, couverture du sujet), pratique
pédagogique fréquente aux États-Unis.
35Il
nous semble que les apprentissages liés à l’évaluation de l’information
et leur transfert à des situations extra-scolaires pourraient être
facilités par la prise en compte des modes opératoires habituels des
élèves dans le cadre de l’EMI et, plus particulièrement ici, des
heuristiques qu’ils emploient. Considérer celles-ci comme des points de
départ de l’activité pédagogique incite à proposer des situations
fortement contextualisées. Plus précisément, cela constitue un moyen de
rapprocher le contexte d’apprentissage de celui dans lequel les
connaissances/compétences informationnelles devront être mobilisées.
Cette concordance entre les deux contextes est un facteur clé pour
favoriser le transfert des apprentissages (Frenay et Bédard, 2006). De
plus, le fait de proposer aux élèves de se pencher sur leurs pratiques
et les modes opératoires inscrits dans leur vie numérique de tous les
jours est susceptible de constituer un facteur de motivation. Le
caractère « authentique » de la situation d’apprentissage
devrait favoriser la perception de la valeur de l’activité (Viau, 2003).
36Nous
proposons ici quelques éléments de réflexion à propos de la prise en
compte pédagogique de ces heuristiques. Il va sans dire que notre propos
est de l’ordre de la prospective et n’a donc aucune visée prescriptive.
37Un
premier travail pédagogique peut conduire les élèves ou les étudiants à
une prise de conscience des heuristiques qu’ils utilisent. Ces modes de
traitement de l’information sont en effet automatisés et inconscients
(Sundar, 2008). La prise de conscience constitue un processus
d’apprentissage fondamental, qui consiste à comprendre ce que l’on
savait faire sans comprendre. Elle implique notamment le fait que l’on
puisse identifier les étapes de notre action (l’analyse), se représenter
leur enchaînement comme un tout cohérent (la. compréhension)
et que l’on sache nommer ce que l’on fait (l’explicitation) (Musial,
Pradère et Tricot, 2012). Ainsi envisagé, ce processus participe au
développement de compétences métacognitives dont on sait l’importance
pour l’évaluation de la fiabilité des sources et l’acquisition d’une
pensée critique (Piette, 1996). Un objectif serait alors de faire en
sorte que les heuristiques, une fois conscientisées, soient appliquées
de manière réfléchie et contrôlée. En bref, il s’agirait de passer d’un
mode routinisé à une pratique réflexive.
38Une
approche envisageable est de se livrer à une analyse critique des
différentes heuristiques. Il paraît possible de construire des séquences
qui visent à montrer leurs avantages et, surtout, leurs limites. Par
exemple, l’heuristique visuelle peut s’avérer trompeuse. Avec les outils
du web social, il est devenu aisé de construire des sites ayant un
aspect visuel attrayant, sans pour autant que les auteurs aient une
expertise dans le domaine où ils s’expriment. Plus encore, les
propagandistes –notamment ceux de Daech (Conesa, Huyghe et Chouraqui,
2016) – savent jouer des codes visuels et esthétiques pour
concevoir des messages, diffusés massivement sur le web, légitimant et
propageant leur idéologie. La prise en compte pédagogique de
l’heuristique visuelle s’accorde bien avec les objectifs classiques de
l’éducation aux médias consistant en une analyse des langages et des
représentations médiatiques et de leurs possibles effets à réception.
39Les
heuristiques expérientielles et de réputation se prêtent également à un
travail argumentatif autour de l’autorité des sources et de sa
dimension sociale : pourquoi consulter habituellement tel ou tel
site ? Pourquoi a-t-il bonne ou mauvaise réputation ? Dans
quelle mesure les informations proposées sont-elles crédibles ?
40Le cas de l’heuristique de confirmation paraît a priori
être plus complexe. Idéalement, le développement d’une pensée critique
passe par la capacité à penser contre soi-même (examiner de manière
critique ses propres croyances et opinions) et à faire preuve de
tolérance et d’ouverture d’esprit à l’égard des opinions et des
arguments d’autrui (prendre conscience du pluralisme des idées). Cette
optique est tout à fait congruente avec les valeurs démocratiques de
l’EMI. À l’inverse, du fait de l’heuristique de confirmation, nous
aurions tendance à privilégier les informations qui sont compatibles
avec nos croyances préexistantes et à sélectionner les sources qui les
diffusent. Ce penchant est accentué par la participation à des réseaux
sociaux numériques marquée par une forte homophilie. Poussé à son
paroxysme, le biais de confirmation pourrait aboutir à une adhésion aux
thèses conspirationnistes (Bronner, 2013). Si l’actualité met en
évidence le caractère problématique de ce phénomène, il est aussi
nécessaire de faire valoir son ancienneté et sa prégnance. Il s’agit
d’un trait humain très ancien ayant une importance notable dans
différentes sphères de l’activité sociale et intellectuelle, comme la
médecine, la justice et la science (Nickerson, 1998). Sa présence est
même attestée dans un processus hautement rationalisé et contrôlé, comme
l’expertise scientifique par les pairs (Lee et al., 2013). Dès
lors, on ne saurait affirmer qu’une simple prise de conscience de
l’existence de cette heuristique puisse suffire à l’atténuer et à
conduire à une évolution des pratiques informationnelles. Il y a sans
doute là un domaine où les acteurs de l’EMI et les chercheurs pourraient
collaborer afin de mieux cerner les dispositifs et les outils
pédagogiques idoines.
41La
prise en compte de l’heuristique d’expertise, c’est-à-dire une
détermination rapide de la crédibilité de l’information par des indices
indiquant l’autorité de la source, mérite une discussion particulière.
On peut en effet se demander si elle ne pourrait pas être validée et
encouragée par les enseignants responsables de l’EMI. Nombre de
situations pédagogiques sont élaborées afin d’amener les élèves à
identifier le degré d’autorité d’une source, d’un auteur, voire d’un
genre documentaire et à se référer à ce critère pour sélectionner un
document (par ex. Wiley et al., 2009). Selon cette perspective,
il peut s’agir d’enseigner aux élèves à reconnaître certains indices
d’expertise (par exemple la fonction d’un auteur, son appartenance à une
institution académique) et à repérer ceux qui, au contraire, ne sont
pas toujours significatifs (typiquement l’adresse URL). L’enseignement
d’une heuristique de l’expertise pourrait avoir l’intérêt d’être
beaucoup moins coûteux d’un point de vue cognitif et temporel qu’une
stratégie analytique et, de ce fait, être mieux accepté par les jeunes
et s’avérer plus facilement applicable.
42Toutefois,
les limites d’une telle approche apparaissent aisément. La
détermination rapide de l’autorité de la source peut s’avérer très
difficile, voire impossible. Cette difficulté est souvent induite par
l’absence d’une standardisation des méta-informations éditoriales
(auteur, éditeur, date de publication...) telles qu’elles existent sur
la page de titre d’un livre. Dans certains dispositifs sociotechniques
collaboratifs comme Wikipédia, se référer à l’auctorialité n’est pas
aisé et l’évaluation de la crédibilité de l’information paraît plus
assurée par le recours à des indices spécifiques, comme la présence de
références bibliographiques mentionnées ou à des stratégies de
vérification de l’information.
43Plus
largement, promouvoir une heuristique de l’expertise ne conduit-il pas à
accorder une confiance excessive aux experts sachant que ceux-ci
peuvent se tromper, être soumis à des conflits d’intérêts, ne pas être
d’accord entre eux, ne pas être compréhensibles par les jeunes ou même
par les adultes... Son opérationnalisation ne risque-t-elle pas de nuire
à la réflexivité traditionnellement attachée à une analyse critique de
l’information ? Pour aller plus avant, l’analyse de la littérature
montre que la question même de la reconnaissance des autorités
académiques dans le cadre de l’EMI ne fait pas l’unanimité. D’un côté,
leur valeur épistémique est donnée comme allant de soi. Implicitement,
les éducateurs admettent l’existence d’une hiérarchie des sources selon
leur degré de scientificité, qui doit être intégrée par les élèves. Être
critique, c’est avant tout reconnaître les formes socialement admises
de production et de diffusion du savoir et s’y référer de manière
préférentielle pour s’informer sur un sujet. De l’autre côté, il existe
un courant pédagogique s’inspirant de la pédagogie critique de Freire
qui conteste cet objectif (Seale, 2010 ; Tewell, 2015). Les notions
d’autorité et de fiabilité sont considérées comme des
constructions situationnelles plutôt que comme des absolus objectifs et
transparents. En ce sens, les jeunes devraient être formés à une
critique globale des systèmes de production de savoir et s’efforcer de
prendre en compte les points de vue marginalisés. Être critique implique
ainsi de prendre conscience que toute information est, quelle que soit
sa source, subjective et toujours imprégnée par le contexte social,
politique et économique.
44Au
final, deux conceptions de la fiabilité paraissent coexister dans
l’EMI : l’une faite de déférence à l’égard des sources académiques,
qui peut être qualifiée de « positiviste » ou de
« normative », et l’autre représentative d’un relativisme
épistémologique, cherchant à promouvoir la polyphonie informationnelle.
45Les
jeunes peinent à évaluer l’information numérique selon sa valeur de
vérité. Ce constat, conjugué avec l’importance sociétale et cognitive de
cette pratique, justifie la mise en œuvre d’un enseignement dédié à
l’appréhension critique de l’information. La prise en compte des
heuristiques, modes opératoires les plus fréquemment repérés chez les
jeunes, amène à interroger les objectifs et les modalités didactiques
d’un tel enseignement. La conscientisation des heuristiques conduit-elle
à des pratiques plus réfléchies et mieux contrôlées ? Peut-on
considérer qu’il s’agit là d’un préalable optimisant l’enseignement
ultérieur de compétences et leur transfert dans des situations
extra-scolaires ? Doit-on viser la consolidation de certaines
heuristiques – notamment celle de l’expertise – en avançant un
argument « réaliste », à savoir sa plus grande facilité
d’opérationnalisation par rapport à des démarches analytiques plus
complexes et plus coûteuses ? Doit-on considérer que l’évaluation
critique passe avant tout par l’appropriation de la hiérarchie
académique des sources ou, au contraire, par sa contestation plus ou
moins radicale ?
46Nous
avons ici initié un débat qui demeure loin d’être tranché. Il nous
semble qu’il s’agit là de questions fécondes pour l’étude scientifique
de l’EMI. Nous espérons avoir suggéré que ce questionnement doit non
seulement se préoccuper des effets et de l’efficacité de l’enseignement
dispensé, mais aussi du positionnement épistémologique et politique des
éducateurs qui le mettent en œuvre.